Astérisque
Il a commencé à fleurir
on ne sait trop pourquoi
comme une pensée, un soucis,
une attention, quelque chose
Appelant à baisser les yeux
pour plus d'informations
il flottait là-haut
comme un début d'explication
Mais cette étoile
dans ce ciel vide de définition
n'a pu cacher longtemps
son manque de précision
Astérisque
Femme astérisque
Souvent sans plus d'explication
Perçu parfois à tord
comme un symbole d'exclusion
par des hommes cis en colère
alors qu'il était au mieux
un pauvre essai d'inclusion
des personnes trans et non-binaires
Mais encore comme souvent
Si les femmes cis sont mises en avant
les personnes trans et/ou non-binaire
derrière
Mouvement de Grève historique
signe de renvoi vers le bas,
un astérisque
pour la diversité foulée par le patriarcat
renvoyée à un signe unique
Un astérisque sans explication c'est
comme une note de bas de page
sans définition
C'est un appel d'air
pour faire entrer du vide
au moment où on s'attend heureuxse
à de l'inclusion
Ne faites pas de vague
Ne nuisez pas à la cause
C'est plus simple pour tout le monde
de mettre une étoile
on comprend de quoi on parle
on sait de quoi on cause
Astérisque
Caractère unique pour multiplicité
Recalé à la fin pour autant qu'on y ait pensé
- Appuyez sur la touche étoile, appuyez sur la touche étoile
- aucun correspondant n'a été attribué
Je ne me reconnais pas dans le mot « femme »
et je ne veux pas m'impliquer
dans une organisation qui refuse de me nommer
de m'inviter, de se questionner
Je ne veux pas non plus venir et faire partie de débats
qui portent sur mon droit d'exister
hors d'une catégorie
dans laquelle on m'a assigné-e
C'est dur de se sentir écarté-e
et incompris
quand une voix dans ma tête
me rejette aussi
C'est dur de lutter
contre cette voix qui me dit
qu'il n'y a aucune raison
de me sentir ni garçon ni fille
Chaque fois qu'on parle de « grève des femmes »
une partie de moi se sent rejetée
je suis nié-e
je suis l'impensé-e
Mais
Chaque fois qu'on parle de « grève féministe »
on sème une graine de pensées
celle où l'on reconnaît l'existence
des personnes trans minorisées
En niant une partie des personnes visées par le patriarcat
on ne fait que répercuter des oppressions
De privilèges en discriminations
De hiérarchie des luttes
à la relégation derrière
de parties minorisées de la population
Même le terme « femmes » n'est pas fort et unifiant
si on nie les différences de privilèges dedans.
Il suffit pas de dire « parité »
pour qu'il n'y ait pas de disparités.
Qui peut descendre dans la rue ?
Qui ne peut pas ?
Qui est appelé-e-x dans la rue ?
Qui ne l'est pas ?
Bref, revenons à mon histoire :
Les mots ont du pouvoir
Le pouvoir s'incarne dans les mots
on peut choisir quand on parle
d'entrer en résistance
de faire reconnaître l'existence
des personnes qui ne sont jamais nommées
Alors il faut la force de se lever soi-même
se dire que les mots valides sont
avant tout ceux que l'on sème.
Il faut pas se résigner
à se taire
astérisque
parce qu'on a été assigné-e-x
dans une case et on risque
notre santé, notre vie
à cause du rejet et du déni
à cause d'une idée sombre et banale
qui nous force dans un genre
d'après nos parties génitales
on vit nourri-e-x de catégories sociales
qui nous forgent
nous inondent d'un imaginaire
prétendu normal
ça a tout à voir avec les gens
pas notre entre-jambe
Forcé-e-x de s'aligner dans une identité genrée
basée sur une binarité censée s'accorder
avec notre genre assigné
Ma grève était féministe
dire « grève des femmes »
c'est oublier que j'existe
C'est n'appeler
que les personnes
à l'aise dans leur genre assigné
et les personnes en décalages
les personnes dans les marges
sont invisibilisées
Femme astérique !
Et nos risques de chômages ? (Ah tu risques pas de trouver un emploi)
Femme astérique !
Et nos risques d'agression ?
Femme astérique !
Et nos risques pour survivre ?
Comment un homme trans
peut se sentir inclus
quand on répète femme, femme, femme
dans la rue ?
Comment quand on nomme que vulve et clitoris
on oublie qu'une partie des femmes trans ont un pénis ?
C'est dur de s'imaginer
quand on n'est pas concernée
ce que ça veut dire d'être en permanence désigné-e-x
par des termes qui ne reflètent pas notre identité
Bien sûr le paradigme
femme, clito, féminin, hétéro
est plus facile
mais la réalité est complexe
comment le faire apparaître dans les textes ?
Depuis plusieurs années
j'ai décidé de m'autoriser
à sortir de la case femme
dans laquelle je me sentais
enfermé-e
en décalage dans mon identité
Chères Femmes-astérisque
Je me sens pas vraiment invité-e
Je me sens décalé-e
Je me sens coupable et triste de pas correspondre
à cette image
de femme féministe
Je me sens défaillante
Je me sens échouer
Chaque fois que vous utilisez le terme de « grève des femmes »
au lieu de « grève féministe »
vous laissez une partie des personnes concernées derrière
On ne choisit pas d'être trans
On ne choisit pas d'être non-binaire
On ne choisit pas d'être queer
Mais on peut choisir d'être inclusifve
au mieux
en se remettant en question
et en écoutant les personnes
concernées par des discriminations
Je dis pas que c'est facile
et qu'il y a une solution
tout prête
Je dis juste que c'est facile
de se poser des questions
De réfléchir à comment on peut
nommer, inclure et représenter
dans un effort d'inclusion
Alors à chaque fois
que vous verrez l'astérisque
derrière le mot « femme »
pensez que « derrière »
il y a des personnes
On vous demande juste de nous
simplifier la vie
pas la vôtre en simplifiant vos termes
Pourquoi mettre une étoile
pour représenter une galaxie ?
Qui sommes nous ?
Nomme-nous
Qui sommes nous ?
Nomme-nous
Nous sommes, trans, queer, non-binaires et notre diversité
doit s'exprimer en plus d'un caractère.